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Du consentement en ses limites
La spécialiste des sciences de l’information Helen Nissenbaum (@hnissenbaum) livre une longue interview pour la Harvard Business Review sur la difficulté du consentement en ligne. Trop souvent, la mise en pratique du consentement est « minable », explique la chercheuse, en prenant pour exemple les bandeaux de cookies que nous devons accepter en allant sur la plupart des sites. Comme les conditions générales d’utilisation, on accepte les cookies, sans avoir aucune idée de ce à quoi on consent. D’ailleurs, le plus souvent ces bandeaux ne laissent pas vraiment le choix. Pour elle, nous sommes actuellement coincés dans une « farce du consentement » qui maintient les utilisateurs dans une fausse impression de contrôle.
Or, toutes les modalités de choix qui sont mis à notre disposition en ligne ne relèvent pas vraiment du consentement, explique-t-elle. Et la chercheuse de prendre un exemple simple : quand vous acceptez de donner votre adresse ou votre code postal, à quoi consentez-vous ? C..
Pourquoi la technologie n’est pas démocratique et comment peut-elle le devenir ?
Sur l’excellent Mais où va le web ? (@maisouvaleweb), Irénée Régnauld (@ireR1) cofondateur de l’association Le Mouton Numérique (@moutonnumerique) faisait récemment part de sa lecture de Choix technologies, choix de société (2003, éditions Charles Léopold Mayer, traduction de Democracy and Technology publié en 1995) de Richard Sclove, fondateur du Loka Institute, une association qui promeut la participation du public aux choix technologiques. Il y rappelle des questions de fond : comment orienter le choix technologique ? Peut-on rendre la technique plus démocratique ? Comment ?… Une lecture qui n’est pas sans évoquer les propos de l’historien des sciences, David Noble, dans Le progrès sans le peuple notamment, qui montrait lui aussi, comment les questions démocratiques sont évacuées des questions technologiques. La question démocratique est-elle l’impensée de la question technologique ?Lecture !
Dans les sociétés modernes, la technologie est une force qui dépasse bien souvent certaine..
Jen Schradie : « Internet contribue souvent à renforcer les inégalités existantes »
Le Digital Society Forum (@odsforum) – disclosure : dont la Fing et InternetActu.net sont partenaires – initié par Orange est un site qui s’intéresse à l’impact du numérique et qui publie notamment des dossiers sur les transformations de nos comportements à l’heure du numérique. Dans le cadre d’une thématique qui explore la question de l’inclusion et de l’exclusion numérique, ce magazine publiait récemment une interview de la sociologue américaine Jen Schradie qui souligne que les inégalités d’usages d’Internet sont encore loin d’être résorbées. La voici à nouveau !
Jen Schradie (@schradie) est sociologue, professeur à l’Observatoire sociologique du changement de Sciences Po. Elle a travaillé aux États-Unis sur les inégalités numériques et étudie la façon dont les inégalités sociales se prolongent en ligne. Ses recherches montrent les limites du discours utopique sur les vertus démocratiques d’Internet et rappellent que le monde en ligne ne représente pas la totalité du monde social...
Et si la régulation de la question attentionnelle n’était pas là où l’on croit ?
Dans Les marchands d’attention (The Attention Merchants, 2017, Atlantic Books, non traduit), le professeur de droit, spécialiste des réseaux et de la régulation des médias, Tim Wu (@superwuster), 10 ans après avoir raconté l’histoire des télécommunications et du développement d’internet dans The Master Switch (où il expliquait la tendance de l’industrie à créer des empires et le risque des industries de la technologie à aller dans le même sens), raconte, sur 400 pages, l’histoire de l’industrialisation des médias américains et de la publicité de la fin du XIXe siècle à aujourd’hui. En passant d’une innovation médiatique l’autre, des journaux à la radio, de la télé à l’internet, Wu tisse une très informée histoire du rapport de l’exploitation commerciale de l’information et du divertissement. Une histoire de l’industrialisation des médias américains qui se concentre beaucoup sur leurs innovations et leurs modèles d’affaires, c’est-à-dire qui s’attarde à montrer comment notre attention a..
L’internet des familles modestes : les usages sont-ils les mêmes du haut au bas de l’échelle sociale ?
Il semble toujours difficile de saisir une enquête sociologique, car, comme toute bonne enquête sociologique, celles-ci sont surtout qualitatives et se fondent sur des témoignages peu nombreux et variés… dont il semble difficile de dégager des lignes directrices. C’est pourtant ce que réussit à faire la sociologue Dominique Pasquier dans son livre, L’internet des familles modestes en s’intéressant aux transformations des univers populaires par le prisme des usages et des pratiques d’internet.
Alors qu’il n’y a pas si longtemps, la fracture numérique semblait ne pouvoir se résorber, les usagers les plus modestes semblent finalement avoir adopté les outils numériques très rapidement, à l’image de l’introduction de la photographie au début du XXe siècle dans les sociétés rurales traditionnelles qu’évoquait Pierre Bourdieu dans Un art moyen. L’internet des classes dominantes et urbaines a colonisé la société, rapporte Dominique Pasquier dans son étude où elle s’est intéressée aux employé..
dWeb : vers un web (à nouveau) décentralisé ?
La journaliste Zoë Corbyn, pour le Guardian est revenue sur le Sommet pour un web décentralisé (vidéos), qui se tenait début août à San Francisco.
Les partisans du web décentralisé, explique Corbyn, souhaitent promouvoir et développer un web qui ne dépendrait plus des grandes entreprises qui amassent nos données pour en tirer profit. Pour ses promoteurs (parmi lesquels on trouve Tim Berners-Lee, Brewster Kahle ou Ted Nelson…), l’enjeu est de revenir à un web originel, avant qu’il ne soit perverti par les grandes plateformes qui ont émergé avec le web 2.0. Redistribuer le web afin que les utilisateurs gardent le contrôle de leurs données, interagissent et échangent des messages directement avec les autres membres du réseau sans passer par des services centralisés : tel est l’enjeu du dWeb.
dApps : le boom des alternatives décentralisées ? Pour Muneeb Ali (@muneed), cofondateur de Blockstack, une plateforme d’applications décentralisées (dApps pour decentralized applications) qui sou..
La guerre mémétique aura bien lieu
Après des années de silence, R.U Sirius, alias Ken Goffman, a relancé sur le web sa revue séminale, Mondo 2000 (@2000_mondo), qui fit les beaux jours de la première cyberculture. Un post de ce blog collaboratif nous faire découvrir un document de 44 pages publié par l’Institut pour le Futur (IFTF), biology of disinformation (.pdf), qui aborde le problème de la « guerre mémétique » et des fake news. R.U Sirius en a profité pour interviewer assez longuement les trois auteurs de ce papier.
L’un d’entre eux, Jake Dunagan, est chercheur à l’IFTF, les deux autres collaborateurs sont bien connus dans les milieux de la contre-cyberculture… David Pescovitz, lui aussi chercheur à l’IFTF, est un des auteurs de Boing Boing, l’un des plus célèbres (et des plus anciens, et des meilleurs) blogs culturels. Le troisième, c’est Douglas Rushkoff (Wikipedia, @rushkoff), lui aussi vieux routier de la cyberculture, qui commença à traiter le sujet dès les années 90, et dont le livre « Media Virus ! Hidden..
À mesure qu’elles croissent, les plateformes deviennent-elles plus hostiles ?
Adam Clair (@awaytobuildit) dans le toujours aussi excellent magazine Real Life (@_reallifemag) expliquait qu’à mesure que les médias sociaux grossissaient, ils avaient tendance à devenir plus hostiles envers leurs utilisateurs.
La croissance est le but des plateformes de partage de contenus. Pour attirer le plus grand nombre possible d’utilisateurs, elles pratiquent une modération a posteriori. Mais cela ne signifie pas que cette modération est contrainte. Comme l’explique le chercheur Tarleton Gillespie (@tarletong) dans son dernier livre, Custodians of the Internet : Platforms, Content Moderation, and the Hidden Decisions That Shape Social Media (Les gardiens de l’Internet : les plates-formes, la modération du contenu et les décisions cachées qui façonnent les médias sociaux, Yale University Press, juin 2018, non traduit), la modération est au coeur de l’offre des plateformes de médias sociaux. Les médias sociaux ont émergé par la promesse d’apprivoiser le chaos du web, via des mo..
Technologie : l’âge sombre
L’artiste et essayiste James Bridle (@jamesbridle) s’intéresse depuis longtemps aux dysfonctionnements de notre monde moderne. Il observe ce qui ne fonctionne pas : les bugs, les glitchs, les ratés de notre développement technologique… Longtemps, il a regardé les espaces de friction entre technologie et société comme le lieu d’expression et de production de nouvelles formes culturelles. C’était ce qu’il appelait « la nouvelle esthétique », celle produite au croisement de la technologie et de la réalité, ces « irruptions visuelles du monde numérique dans le monde physique ». Il en a joué plus que tout autre, en produisant des dispositifs pour interroger la manière même dont nous produisons notre monde moderne. L’un des exemples les plus célèbres – parmi d’autres – étant certainement le piège à voiture autonome qu’il imagina, comme une mise en abîme des limites de la soi-disant intelligence artificielle qu’on pouvait prendre au piège comme un enfant… On avait évoqué rapidement, au printe..
Peut-on rendre le ciblage psychologique productif ?
Sur la scène des conférences USI, intervenait notamment Sandra Matz, spécialiste de l’étude marketing des caractéristiques psychologiques via le Big Data.
Le scandale Cambridge Analytica a mis en lumière le rôle du profilage psychologique. Peut-être pas d’une manière très valorisante, semble regretter Sandra Matz. Si elle ne souhaite pas parler de ce que fait ou n’a pas fait Cambridge Analytica, force est de constater que Sandra Matz travaille elle aussi comme la firme britannique, à rendre productif le profilage psychologique. Et c’est ce qu’elle souhaite expliquer sur la scène d’USI (voir la vidéo de son intervention) : Comment ça fonctionne ? Qu’est-ce que ça produit ? Et surtout, regarder si ce profilage est réellement efficace : « peut-on réellement influencer les gens avec ces techniques ? » « Quels sont les défis et les opportunités du ciblage et du profilage psychologique ? »
Image : Sandra Matz sur la scène des conférences USI, via USIevents.
Comment réalise-t-on des modè..